Chaque mois, un juriste de L'Appel Expert répond dans ces colonnes à plusieurs questions qui lui ont été soumises par des élus du personnel. Ce mois-ci, nous avons choisi de traiter des problématiques liées à la crise sanitaire : "Comment tenir les réunions ordinaires du CSE pendant la pandémie ? Les salariés doivent-ils tous être placés en même temps en activité partielle ? En cas d'activité partielle, les heures supplémentaires doivent-elles être indemnisées ? Peut-on contraindre un salarié à venir sur son lieu de travail ?"
Dans le cadre du service de renseignement juridique par téléphone du groupe Lefebvre-Sarrut (*), les juristes d'Appel Expert sont souvent sollicités par des élus du personnel. Nous avons eu l'idée de leur demander de choisir quelques questions qui leur ont été soumises et d'y répondre. Voici leur sélection pour ce mois de mars, marquée par une thématique commune : la situation liée à la pandémie du covid-19, dit coronavirus.
QUESTION N°1 : le CSE
"Comment tenir les réunions ordinaires du CSE en période de crise sanitaire ?"
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► La réponse de Florian Erard, juriste à l'Appel Expert


A l'heure actuelle, le code du travail ne prévoit pas cette situation de crise sanitaire. Un CSE doit tenir, selon l'effectif de l'entreprise, une réunion tous les mois ou tous les deux mois. Seulement deux modalités sont prévues : la réunion où les membres du CSE sont présents physiquement, ou la visioconférence, qui nécessite un matériel permettant d'identifier les personnes afin que la consultation ait lieu dans des conditions régulières, ce que toutes les entreprises n'ont pas, a fortiori si les élus sont à leur domicile. L'entreprise doit-elle faire venir les élus pour qu'ils assistent à la réunion ? En principe, oui, il n'y a pas de cas de dispense prévu. Sauf que l'employeur, tenu à l'obligation d'assurer la sécurité et la santé des salariés, doit tenir compte des consignes sanitaires : distance minimum entre les personnes, limitation du nombre de personnes présentes au même moment dans la même salle, etc. Comment donc, en pratique, éviter le risque sanitaire ? En attendant les éventuelles nouvelles dispositions que prépare le gouvernement dans le cadre d'une ordonnance (lire notre article), on peut imaginer que les élus et l'employeur puissent d'un commun accord se réunir par conférence téléphonique. La pratique n'est certes pas prévue par le code du travail, mais on peut penser qu'un juge amené à se prononcer sur la légalité de la consultation tiendrait compte des circonstances exceptionnelles créées par l'épidémie de covid-19. L'autre conseil que nous pourrions donner, c'est de repousser les consultations sur des projets importants mais non urgents, afin que le CSE puisse se réunir ultérieurement dans des conditions normales pour donner son avis, par exemple, sur un déménagement (voir aussi notre article).
QUESTION N°2 : L'ACTIVITÉ PARTIELLE OU CHÔMAGE PARTIEL
"Les salariés d'un même établissement ou d'une même entreprise doivent-ils être placés en même temps en activité partielle ?"
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► La réponse de Florian Erard, juriste à l'Appel Expert


Un abonné nous a posé la question suivante : "Tous les salariés d'une entreprise ou d'un établissement doivent-ils être placés en même temps en activité partielle ou peut-on prévoir un roulement ?" Rappelons d'abord que l'activité partielle est une mesure collective. Elle ne peut pas concerner un seul salarié d'un établissement, a établi la Cour de cassation dans un arrêt du 19 juillet 1995. Une instruction technique d'août 2013 sur l'activité partielle nous en dit un peu plus. Ce texte précise que la mesure d'activité partielle peut concerner une unité de production, un atelier, un service ou une équipe chargée de la réalisation d'un projet, donc une entreprise peut à la fois organiser le télétravail pour ses services administratifs et mettre en activité partielle les services directement chargés de l'accueil du public, par exemple. Il paraît également possible d'établir une rotation dans une même équipe afin de maintenir une certaine activité. Tous les salariés peuvent donc être placés en activité partielle mais pas le même jour.
QUESTION N°2 bis : L'ACTIVITÉ PARTIELLE OU CHÔMAGE PARTIEL
"Les heures supplémentaires doivent-elles faire l'objet d'une indemnisation au titre de l'activité partielle ou par l'employeur ?"
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► La réponse de Florian Erard, juriste à l'Appel Expert


De très nombreux élus du personnel nous posent cette question. L'article R. 5122-11 du code du travail est clair sur ce point : les heures non travaillées font l'objet, au titre de l'activité partielle, du versement d'une allocation, mais seulement dans la limite de la durée légale de travail. Les heures effectuées au-delà de la durée légale ne sont pas indemnisées par l'allocation de l'activité partielle, et l'employeur n'a pas non plus à les prendre en charge, sauf si une disposition d'un accord collectif ou conventionnel l'y oblige.
QUESTION N°3 : LE DROIT DE RETRAIT
"Un employeur peut-il contraindre un salarié à se rendre au travail ?"
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► La réponse de Florian Erard, juriste à l'Appel Expert


Cette question est celle, en fait, de l'exercice de son droit de retrait par un salarié auquel l'employeur demande de se rendre sur son lieu de travail pour prendre son poste. Lorsque l'activité de l'entreprise n'est pas suspendue légalement, l'activité continue et le salarié doit donc travailler. Mais l'employeur, comme le précise l'article L. 4121-1 du code du travail, doit prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale du salarié. Le passage au stade 3 de l'épidémie de covid-19 impose à l'employeur de recourir dès que possible au télétravail. S'il ne peut recourir au télétravail, l'employeur doit donc assurer toute la prévention possible pour le salarié, à défaut de quoi le salarié peut faire jouer son droit de retrait, car c'est le travailleur qui apprécie le danger auquel il est exposé. Il est donc très difficile de répondre de façon générale à cette question. D'autant que les consignes de sécurité à appliquer ont varié et ont donné lieu à différentes interprétations par les experts, et que certains matériels (masques, gel hydroalcoolique, etc.) étaient ou sont encore indisponibles. Dans son question-réponses, le ministère du Travail soutient que la notion de pandémie ne justifie pas, en soi, le droit de retrait, et que celui-ci n'est possible que lorsqu'une entreprise ne respecte pas les nouvelles consignes de sécurité sanitaire (espacement, nombre de personnes réduit dans un même espace, etc.). Il nous semble donc que le droit de retrait, qui peut exposer le salarié à des sanctions en cas d'abus, doit s'exercer avec prudence, en cas de violation flagrante de ces principes de sécurité, comme le prévoit l'article L. 4131-1 du code du travail. Dans ce cas-là, il semble plus prudent de procéder à un droit de retrait collectif.
(*) le groupe auquel appartient les Éditions Législatives, éditeur d'actuEL-CSE.fr.
Représentants du personnel
Les représentants du personnel sont des salariés élus ou désignés chargés de représenter les salariés de l’entreprise avec des missions spécifiques selon l’instance représentative du personnel (IRP) à laquelle ils appartiennent. Il y a quatre grandes IRP : les DP, le CE, CHSCT et les délégués syndicaux. Au 1er janvier 2020, l’ensemble des IRP (hormis les délégués syndicaux) devront fusionner au sein du CSE.
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